La réponse est OUI ! L’État, dans certains cas, peut intervenir dans un processus de succession, soit à son profit, soit au profit d’héritiers qui seraient considérés comme étant spoliés, à la suite, par exemple, d’un abus de faiblesse, ou d’un recel successoral. Voici quelques éléments permettant de mieux comprendre ces différentes notions…
Quand l’État récupère de l’argent d’un héritage pour son propre compte
Certaines aides sont versées par l’État, « à fond perdu » ; c’est-à-dire qu’elles ne seront jamais remboursables. C’est le cas, par exemple, de l ’allocation personnalisée d’autonomie (Apa), de la prestation pour personnes handicapées, de la couverture maladie universelle (CMU) ; ou encore, du revenu de solidarité active (RSA).
En revanche, il est d’autres aides qui peuvent, lors du décès du bénéficiaire, faire l’objet d’une demande de remboursement par l’État, auprès des héritiers, des légataires (c’est-à-dire un héritier désigné par testament), ou d’éventuels bénéficiaires de donations. Cela n’a rien de systématique : les dossiers sont examinés, au cas par cas, à l’ouverture de la succession, par des commissions ad ’hoc, qui peuvent décider, soit de réclamer la totalité des aides versées, soit une partie seulement, soit… rien du tout ! En tout état de cause, le montant revendiqué ne peut excéder le montant des prestations versées au défunt, à concurrence de l’actif net successoral, après déduction des dettes et frais tels que les impôts, les loyers, les obsèques. Par ailleurs, un héritier qui décide de renoncer à la succession ne peut être sollicité pour le paiement des dettes du défunt (sauf pour des frais d’hospitalisation, où l’héritier peut être poursuivi en qualité de « débiteur d’aliments tenu par un devoir de secours ») ; et les héritiers, légataires ou donataires ne seront en aucun cas responsables de ces dettes sur leurs bien personnels.
Les aides qui peuvent potentiellement être soumises à remboursements sont les suivantes :
L’allocation de solidarité aux personnes âgées (Aspa) : ce type d’aide est récupérable si l’actif net de la succession excède le seuil de 39.000 euros, et dans un délai de 5 ans maximum après le décès. Le recouvrement se fera uniquement sur la part dépassant le montant du seuil. Quant à la part du conjoint survivant son recouvrement peut être différé jusqu’à son décès.
L’allocation supplémentaire d’invalidité (Asi) : cette aide peut être réclamée mais là encore, son recouvrement sera différé si l’héritier est atteint d’un grave handicape, s’il est âgé d’au moins 65 ans (60 ans si l’héritier est déclaré inapte au travail) et qu’il vivait avec le défunt en étant à sa charge.
L’aide sociale en maison de retraite : si le défunt a séjourné dans une maison de retraite ou un autre type d’établissement (court, moyen ou long séjour), financés par l’aide sociale du département ; les frais inhérents à son séjour pourront également être récupérables par l’État. En théorie les sommes dues le sont au premier euro, et quel que soit le montant de l’actif successoral. Pour autant, la récupération ne peut avoir lieu sur la part de succession du conjoint, des enfants ou parents d’une personne handicapée et hébergée dans un établissement social ou médico-social, ou de celui ou celle qui en a assumé la charge. Comme énoncé plus haut, l’administration étudie les situations au cas par cas avant d’entamer un processus de recouvrement.
Les frais d’hospitalisation ou de placement dans un établissement de moyen ou long séjour : ces frais peuvent être réclamés à des personnes tenues à une obligation alimentaire à l’égard du défunt, tels que le conjoint survivant, les enfants, les parents ou les grands-parents.
Quand l’État récupère de l’argent d’un héritage pour réparer une injustice
Des histoires de conflits autour d’héritages défraient souvent la chronique. Quand elles se terminent devant un tribunal, l’héritier peut être contraint de rendre ce qui lui a été indument versé ; par exemple s’il est jugé coupable.
D’abus de faiblesse : dans le cadre d’une succession, il s’agirait de prouver que la personne qui a hérité, a profité de la vulnérabilité du défunt avant sa mort, pour se faire arroger tout ou partie des biens, au détriment des autres héritiers. Ce délit défini par l’article 223-15-2 du Code pénal est reconnu s’il touche un mineur, une personne malade, infirme ou en situation de déficience physique ou psychique, ou encore, une personne en état de sujétion psychologique.
De recel successoral… Est ainsi désigné : “tout acte, comportement ou procédé volontaire par lequel un héritier tente de s’approprier une part supérieure sur la succession que celle à laquelle il a droit dans la succession du défunt et ainsi rompt l’égalité dans le partage successoral”. Ainsi, par exemple, retirer de l’argent du compte bancaire du défunt, ou cacher intentionnellement un bien lui appartenant afin de les soustraire à la succession constitut un recel successoral. Si l’acte est prouvé, la justice peut ordonner la restitution et le repartage des biens, ainsi que, dans certains cas, le versement de dommages et intérêts au(x) cohéritier(s).
De captation d’héritage. Contrairement au scénario précédent, l’auteur de la captation d’héritage n’a pas, lui, le statut d’héritier. Il s’agit d’un tiers, qui a détourné, à son profit, tout ou partie de l’héritage, par des manœuvres qui seront estimées frauduleuses, telles que, par exemple, le fait de se faire désigner en tant que bénéficiaire d’un contrat d’assurance vie. Les héritiers et légataires peuvent, dans ce cas, agir en justice dans un délai de cinq années, pour annuler les effets de la captation d’héritage.