Comment obtenir une prestation compensatoire en cas de divorce ?

Découvrez les étapes pour obtenir une prestation compensatoire lors d'un divorce. Conseils pratiques et procédures à suivre.

Temps de lecture : 7 minutes

Obtenir prestation compensatoire divorce

Vous avez moins d’argent que votre ex ? Demandez une prestation compensatoire.

Après le divorce, plus de devoirs entre époux bien sûr. Mais on n’efface pas ainsi une ardoise de parfois plusieurs dizaines d’années : la prestation compensatoire existe pour compenser autant que possible la disparité que la rupture du mariage crée dans vos conditions de vie respectives.

Autrement dit, pas question que l’un se retrouve totalement plumé pendant que l’autre profite du magot : vous avez partagé les aléas de la vie, il est normal que l’enrichissement de l’un profite un peu à l’autre.

Pour la paix des familles, le droit encourage un règlement rapide des conséquences du divorce, et l’aspect financier ne fait pas exception.

En ce qui concerne la prestation compensatoire, elle remplace désormais l’ancienne « pension alimentaire » post-divorce et est, chaque fois que c’est possible, versée en une fois, sous forme de capital.

Avez-vous droit à une prestation compensatoire ?

Avant toute chose, il faut la demander : si vous ne le faites pas, le juge ne pourra pas vous le suggérer, et encore moins condamner votre ex à vous en verser une.

Or, une fois le divorce prononcé, il sera trop tard. Mettez donc de côté votre orgueil et réfléchissez bien avant de repousser cette idée.

Pourquoi est-ce toujours les femmes qui bénéficient d’une prestation compensatoire ?

Détrompez-vous, les hommes peuvent aussi y prétendre.

Dans l’immense majorité des cas, c’est l’ex-femme qui en profite encore, parce que c’est souvent elle qui a les revenus les plus bas, ou en est même dépourvue quand elle s’est consacrée à son foyer. Ce n’est donc pas parce que les juges la favorise, mais parce que c’est elle qui remplit les conditions nécessaires.

Mais cela marche dans les deux sens, et l’on voit désormais des maris en réclamer une.

Ainsi, un de mes clients, relativement fortuné, et qui avait pendant des années entretenu son épouse désargentée mais menant grand train, n’a pas hésité, lorsque celle-ci a hérité de l’immense fortune familiale pendant la procédure de divorce, à demander une solide prestation compensatoire, qu’il s’est logiquement vu accorder.

La prestation compensatoire peut être sollicitée dans tout type de divorce, et désormais même si celui-ci est prononcé à vos torts exclusifs.

Seule la disparité dans le train de vie de votre moitié et vous-même sera vérifié par le juge pour décider si vous y avez droit. Mais même s’il y a bien une différence de train de vie, il pourra refuser toute prestation compensatoire s’il considère que « l’équité le commande », nous dit le Code civil : formule quelque peu obscure, elle semble surtout offrir au magistrat la possibilité de rejeter votre demande s’il l’estime moralement contestable.

Ne comptez donc pas trop sur une prestation si vous avez frappé ou violenté votre conjoint(e), si vous l’avez abandonné(e) au moment où il/elle tombait gravement malade, etc.

Quel sera son montant ?

Le juge va bien sûr examiner votre train de vie actuel à tous les deux, mais pas seulement. Il doit aussi chercher à évaluer ce qu’il sera à l’avenir, c’est­-à-dire après le prononcé du divorce.

Il va utiliser certains critères pour l’aider dans sa décision, énumérés par le Code civil, soit :

  • La durée du mariage : plus la vie commune a été longue, plus vous avez partagé les galères et les coups durs, plus la prestation sera conséquente. Mais si vous avez vécu ensemble avant de vous marier, même longtemps, rien n’oblige le juge à en tenir compte.
  • L’âge et l’état de santé des époux : si vous êtes âgé(e) et malade, votre prestation sera plus importante que si vous avez encore toute la vie devant vous et que vous êtes en pleine forme.
  • La qualification et la situation professionnelle des époux : si vous êtes au chômage depuis quelques années, si vous n’avez pas fait de longues études, si vous n’avez jamais travaillé, votre prestation sera plus importante que si votre CV vous permet de retrouver rapidement un emploi bien payé.
  • Les conséquences résultant des choix professionnels faits par l’un des époux pendant la vie commune pour l’éducation des enfants, et le temps qu’il faudra encore y consacrer, ou pour favoriser la carrière de son conjoint au détriment de la sienne : vous avez beau avoir une formation d’ingénieur, si n’avez pas exercé depuis vingt ans, votre profession, vos chances de vous faire tout(e) seul(e) une place au soleil sont minces, et votre prestation s’épaissira en conséquence.
  • Le patrimoine estimé ou prévisible des époux, tant en capital qu’en revenus, après la liquidation du régime matrimonial : donc, plus votre part du gâteau est réduite, plus vous pourrez demander à grignoter celle de votre ex.
  • Les droits existant et prévisibles : si vous êtes l’unique héritier(ère) de [‘Oncle Picsou, qu’il est mourant, et qu’il est donc probable que vous deveniez prochainement très riche, votre ex peut le faire valoir pour faire diminuer le montant de la prestation (même si les espérances successorales ne sont pas officiellement reconnues comme un critère de fixation).
  • La situation respective en matière de pension de retraite : on vous l’a dit, le juge examine votre situation actuelle, mais se projette également dans le futur.

Le JAF (juge aux affaires familiales) n’est pas obligé de se contenter de cette liste de critères, et suivant le cas auquel il a affaire, il peut tenir compte d’autres éléments, comme par exemple les ressources du (de la) nouveau(elle) conjoint(e) de votre ex.

Des méthodes de calcul ont été élaborées par des professionnels du droit (notaires, etc.), pour certaines très affinées, afin de cerner ce montant, souvent point d’orgue de la procédure. Mais sachez qu’au final il appartient au juge seul de trancher en fonction des éléments spécifiques de chaque dossier.

Quand et comment allez­ vous la toucher ?


Elle est fixée dans le jugement de divorce et sera donc versée une fois celui-ci prononcé.

Depuis 1975, le principe est simple : versement en une fois, sous la forme d’un capital. Ce n’est que si les moyens financiers de votre ex ne lui permettent pas ce versement unique qu’une rente peut être prévue à la place. Mais pendant longtemps, le principe est devenu l’exception, et l’exception le principe : en pratique, en effet, les juges prévoyaient souvent un versement mensuel, et rarement un capital.

Les réformes successives ont voulu remédier à cette dérive. Désormais, c’est bien le capital qui est roi, mais pas nécessairement sous la forme de liquidités : votre ex peut également être condamné(e) à s’en acquitter :

  • en vous cédant un bien lui appartenant, en usufruit ou en plein propriété.
  • en vous accordant sur un de ses biens (le plus souvent le domicile conjugal) un droit d’usage ou d’habitation, temporaire ou jusqu’à votre décès (voir ci-dessous, sur le domicile conjugal).

Mais si les revenus et le patrimoine de votre ex ne lui permettent pas de tout verser en une fois, le juge pourra prévoir à sa demande un versement en plusieurs fois, sur huit ans au maximum, étant précisé que les versements seront indexés sur l’indice INSEE du coût de la vie.

Enfin, rien n’empêche le juge de combiner tous les modes de versement, en condamnant par exemple votre ex à vous donner sa résidence secondaire ainsi qu’une somme importante aujourd’hui et plusieurs de moindre importance dans les années à venir.

À titre tout à fait exceptionnel, le magistrat peut prévoir une rente à la place d’un versement en capital, mais alors elle sera forcément viagère : en aucun cas elle ne peut être temporaire. Cette rente sera indexée chaque année sur l’indice des prix à la consommation fixé par l’INSEE. Cette décision ne sera prise que si votre âge et/ou votre état de santé ne vous permet pas de subvenir à vos besoins. Le but est alors que vous touchiez chaque mois une somme d’argent qui vous permettra de vivre. Parce qu’elle doit rester occasionnelle, une telle décision devra être motivée en détail par le juge.

Là encore, ce dernier peut mixer, en prévoyant à la fois le versement d’un capital et une rente.

Et si nous divorçons par consentement mutuel, que pouvons-nous prévoir ?

Ce que vous voulez!

Oubliez les règles que détaillées ci-dessus, vous pouvez parfaitement décider que la prestation sera versée sous forme de rente sans avoir à vous justifier. Vous pouvez même prévoir qu’elle cessera en cas de concubinage, qu’elle sera temporaire, etc.
D’ailleurs, même dans un divorce contentieux, vous pouvez passer un accord avec votre ex sur ce point, et le soumettre au juge

Pourra-t-elle être modifiée après le divorce ?

En principe, non. Ce qui peut être modifié dans certains cas, ce n’est pas le montant, mais les modalités de versement.

Si la prestation devait à l’origine être payée sous forme de capital, votre ex (et non vous) pourra demander un changement si sa situation (financière) a été modifiée de manière importante depuis, par exemple en procédant à rééchelonnement des paiements. Le juge peut même, exceptionnellement, et en motivant sa décision, prévoir un versement sur plus de huit ans. À l’inverse, si votre ex devait au départ payer en plusieurs fois, il/elle peut toujours décider de verser le solde de ce qu’il/elle vous doit à tout moment, sans avoir à motiver ce choix et sans vous demander votre avis. Logique, puisque le droit français favorise tout ce qui vous permettra de couper les ponts une fois pour toutes.

De votre côté, une fois le régime matrimonial liquidé, si vous constatez que votre chère moitié a désormais les moyens de payer en une fois ou qu’elle a dissimulé une partie de ses ressources au moment de la fixation du montant de la prestation compensatoire, n’hésitez pas à retourner devant le juge pour demander qu’il le fasse. Enfin, si vous avez divorcé par consentement mutuel, vous pouvez toujours, si vous êtes tous les deux d’accord pour cela, demander au juge une modification de votre convention initiale.

Les très rares cas où le montant peut changer

Si la prestation est une rente, votre ex ou vous pouvez demander sa suppression ou sa modification en prouvant que l’un ou l’autre a vu changer ses besoins ou ses ressources de façon importante depuis le jugement de divorce. Depuis la loi ° 2015-177 du 16 février 2015, le juge doit tenir compte de la durée de versement de la rente et des montants déjà versés. Ainsi, le débiteur peut désormais invoquer un avantage manifestement excessif au bénéfice du créancier, qui n’est soumis à aucun changement dans la situation financière du débiteur ou du créancier.

Concrètement ? En cas de perte d’emploi, de nouvel enfant arrivé dans la famille, de maladie invalidante, ou au contraire en cas d’héritage, de promotion, d’un concubinage tout frais qui permet de partager les charges et d’augmenter les revenus, et pourquoi pas, comme c’est arrivé à un de mes clients, … si celui qui paie gagne au Loto !

Attention cependant, le montant de la rente ne peut pas être augmenté. Notez que 54 % des ex-époux échouent dans leur demande.

Si la prestation est un capital, échelonné ou non, la modification du montant est impossible, sauf :

  • s’il était le résultat d’une convention entre vous que le juge a homologuée.
  • si vous avez prévu la possibilité d’une modification dans cette convention ou que vous êtes tous deux d’accord pour passer un nouveau pacte.

Mes héritiers vont-ils devoir continuer à payer la prestation compensatoire que je dois à mon ex ?

Oui, mais dans la limite de ce que vous leur avez laissé. Ils ne paieront pas de leur poche si votre héritage ne suffit pas.
Si la prestation était prévue sous forme de capital échelonné, ils devront payer tout le solde en une fois. Idem s’il s’agissait d’une rente : celle-ci sera transformée en capital et immédiatement exigible.

Si vos héritiers préfèrent que rien ne change, ils peuvent continuer à verser la prestation dans les mêmes conditions que vous, mais dans ce cas, ils devront continuer à payer même si tout l’héritage y est déjà passé. C’est prendre un gros risque …

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