Quelles sont les obligations légales et morales dans un mariage?

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Vous avez, en théorie, librement choisi de vous marier. Ce que vous ne saviez pas, en descendant l’allée, comblé de bonheur et les larmes aux yeux, c’est que la loi française impose automatiquement un certain nombre de devoirs et de droits réciproques à vous et à votre conjoint. Les juristes ont des noms obscurs pour désigner ces droits et devoirs “inévitables” : c’est le statut matrimonial de base, parfois appelé régime primaire.

Pour le reste, les relations entre les époux varient en fonction du régime matrimonial choisi. Qu’il s’agisse de l’état matrimonial de base ou du régime matrimonial, tous deux ont des conséquences non seulement entre les époux mais aussi à l’égard des tiers.

De plus, ils s’appliquent aussi bien pendant la durée du mariage que lors du divorce, d’où l’importance de connaître leur contenu au préalable !

Le devoir de fidélité

Il est certain que ce devoir vous est familier. Cependant, il soulève quelques points qui méritent d’être mentionnés :

Tout d’abord, si vous violez ce devoir, vous n’en subirez les conséquences qu’en cas de séparation. En théorie, rien ne vous empêche de demander réparation à votre partenaire, sans divorcer, si vous avez été ou êtes trompé. Mais dans la pratique, personne ne le fait. Il faut également noter que vous pouvez aussi exiger une compensation de l’amant s’il était au courant de votre mariage lorsqu’il s’est engagé dans des activités amoureuses avec votre partenaire. Pouvez-vous le croire ?

Il est impossible d’utiliser une infidélité passée comme motif de divorce pour faute. Si vous avez pardonné à votre partenaire (ce qui est considéré comme le cas si vous avez continué à vivre ensemble après avoir découvert la liaison, à moins que vous puissiez prouver que vous êtes resté en dehors de toute obligation financière tout en refusant de partager le même lit ou d’avoir le moindre contact avec votre conjoint), cela est considéré comme un pardon permanent. Injuste, dites-vous ?

Tout d’abord, l’infidélité peut aussi être “virtuelle” – dès lors qu’il existe une relation amoureuse avec un tiers. Certains juges ont reconnu l’infidélité morale comme un acte répréhensible, même en l’absence de relations sexuelles adultères, car elle est considérée comme insultante pour le lien affectif du conjoint. Cependant, le défaut de pension alimentaire est soumis à l’appréciation souveraine des juridictions inférieures. Les juges décident donc au cas par cas et en tenant compte des évolutions sociétales. Récemment, des juges ont estimé qu’une femme qui avait eu un enfant avec quelqu’un d’autre parce que son mari refusait d’en avoir un n’avait pas commis de faute.

Le devoir d’assistance

En cas de maladie ou de faiblesse affectant l’un ou l’autre d’entre vous, ce devoir d’assistance prend toute sa signification : si votre partenaire se trouve dans une telle situation, vous êtes tenu de lui apporter un minimum de soins et d’attention. Tout comme le devoir de loyauté, le devoir d’assistance est rarement sanctionné directement. Cependant, sa violation peut être invoquée comme une faute dans une procédure de divorce ou de séparation de corps.

Le devoir d’assurer ensemble la direction morale et matérielle de la famille

Certes, mais quant à la sanction de l’époux qui ne satisferait pas à son obligation d’assurer la direction morale de la famille, elle est assez théorique …

L’obligation de vous astreindre à une communauté de vie

Elle recouvre non seulement l’obligation de cohabiter, mais également celle de vous soumettre au « devoir conjugal ».

  • Il n’est pas possible de forcer physiquement votre conjoint à accomplir son devoir conjugal, car le viol conjugal est un crime. Il est difficile d’imaginer comment un juge pourrait vous condamner à coucher avec votre mari ou votre femme, en précisant la durée et la fréquence des relations… absurde, bien sûr ! En revanche, vous pouvez faire valoir dans votre procédure de divorce le manque d’enthousiasme de votre conjoint pour les relations intimes, voire l’absence totale de relations sexuelles par sa faute (à condition que vous puissiez le prouver !).
  • En théorie, un manquement à l’obligation de vie commune peut aussi potentiellement donner lieu à l’octroi de dommages et intérêts sans aucune procédure judiciaire. De plus, la jurisprudence reconnaît que si vous refusez de cohabiter sans raisons valables, cela peut justifier le refus de votre conjoint de contribuer financièrement au mariage, puisqu’il entendait remplir cette obligation dans le cadre d’une vie commune, ce que vous avez empêché.
  • En ce qui concerne l’obligation de vivre sous le même toit, l’absence de son application n’est pas pénalisante si toi et ton conjoint acceptez d’avoir des résidences séparées, tant que vous passez suffisamment de temps ensemble pour être considérés comme vivant en couple. Bien que cet arrangement familial soit loin d’être la norme, de plus en plus de couples l’adoptent, généralement pour des raisons professionnelles.
  • Dans sa forme la plus grave, elle devient un abandon de famille : si votre mari bien-aimé a choisi de s’installer dans un loft avec sa dernière conquête de dix-neuf ans, sans vous donner un centime pour vous et vos trois enfants, il commet un crime.

La liberté de choisir librement la profession que vous souhaitez exercer

Cela peut paraître évident, pourtant le fait que le Code civil prenne aujourd’hui la peine de le préciser indique que cela n’a pas toujours été le cas par le passé. Mesdames, sachez que pendant longtemps, vous ne pouviez travailler que si votre “homme” le permettait. Ce n’est qu’en 1965 que l’égalité absolue de chaque membre du couple a enfin été reconnue.

Mais toutes ces libertés ont à la fois des limites et des contreparties, parmi lesquelles :

L’interdiction de disposer seul(e) du logement familial

Il ne vous est en effet pas possible de prendre seul(e) une décision concernant le logement de votre famille, qui pourrait obliger celle-ci à le quitter. Plusieurs remarques importantes :

  • Cette règle essentielle est valable que vous soyez locataire ou propriétaire.
  • De même, peu importe que le bien ait été acquis ou loué par un seul d’entre vous avant le mariage : dès que votre famille y vit (mais ça ne fonctionne pas pour les résidences secondaires), il est protégé, ce qui interdit à un conjoint seul de le vendre, de l’hypothéquer, de le nantir, de le louer ou le sous-louer, de résilier le contrat de bail, etc.

Alors que se passe-t-il si votre époux(se) viole cette interdiction ? C’est très simple : vous pouvez demander en justice que soit constatée la nullité de l’acte, ce pendant un an après en avoir eu connaissance, et, si le mariage a pris fin, pendant l’année qui suit.

  • La règle ne se limite pas aux murs : elle est vraie aussi pour les meubles.
  • Reste-il des décisions que vous pouvez prendre seul(e)? La jurisprudence conserve la même logique : il s’agit bien de s’assurer que la famille ne pourra se retrouver sans domicile par le fait de l’un d’entre vous seul. Donc, si vous êtes seul(e) propriétaire du logement familial, vous pourrez en céder la nue-propriété, puisque vous en conserverez l’usufruit. En revanche, vous ne serez pas autorisé(e) à résilier seul(e) le contrat assurant le logement. De même, vous avez le droit de disposer de votre bien après votre mort, et donc de le léguer à une tierce personne.

Attention toutefois, la loi protège votre conjoint(e) en lui permettant dans tous les cas de conserver dans l’année qui suit votre décès la jouissance du logement familial.

Les actions permettant de contrer l’inaction de votre conjoint(e)

On distingue l’habilitation et l’autorisation, qui exigent cependant toutes deux l’intervention d’un magistrat professionnel, auquel il faudra donc démontrer la nécessité d’y recourir.


  • Si votre conjoint est “incapable d’exprimer sa volonté”, par exemple pour des raisons de santé ou parce qu’on ne sait pas où il se trouve, vous pouvez demander à agir en son nom. Cette autorisation sera donnée, selon la situation, pour un acte précis ou de manière générale
  • Dans le même cas de figure, vous pouvez aussi demander l’autorisation d’accomplir seul un acte qui nécessiterait habituellement l’accord des deux conjoints. Notez deux différences essentielles : l’autorisation porte toujours sur un acte précis et n’est pas donnée de manière générale.
  • De plus, elle ne peut s’appliquer qu’aux décisions qui auraient dû être prises ensemble et non aux décisions que la personne représentée aurait dû prendre seule.

Les actions permettant de lutter contre l’action nuisible de votre conjoint(e)

Là encore, le Code civil en prévoit deux :

  • Il est possible de demander l’intervention du tribunal pour empêcher votre partenaire de s’engager dans certaines actions qu’il aurait pu faire de lui-même dans des circonstances normales, lorsque les intérêts de votre famille sont en jeu. Par exemple, si votre conjoint est un joueur compulsif qui dilapide les revenus et les économies du ménage.
  • Si votre conjoint est fautif, c’est-à-dire qu’il a gravement manqué à un devoir conjugal, et qu’il est urgent de protéger les intérêts de la famille, le juge ordonnera toutes les mesures nécessaires. Le juge possède donc un large éventail de pouvoirs, proportionnels à la gravité de la situation. Attention toutefois, ces dispositions ne peuvent être que temporaires, même si elles peuvent être renouvelées. En tout état de cause, elles n’excéderont pas une durée de trois ans.

La liberté de faire ce que vous voulez de votre salaire

Chacun reçoit son salaire et peut en faire ce qu’il veut tant qu’il remplit ses obligations conjugales. C’est à vous de décider si vous dépensez ou investissez vos revenus. Attention cependant : un bien acquis avec votre salaire ne sera pas automatiquement considéré comme un bien propre ; tout dépend du régime matrimonial que vous avez choisi.

La liberté d’ouvrir un compte en banque et de le faire fonctionner seul(e)


Tout comme pour le droit de disposer de votre salaire, il est important de faire ici la distinction entre liberté et propriété. Il ne s’agit pas de savoir si l’argent déposé sur votre compte est un bien personnel ou un bien commun. Ce que dit le Code civil, c’est que chacun d’entre vous peut librement ouvrir tout type de compte bancaire (épargne, compte-titres, compte épargne logement, plan d’épargne en actions, etc.), et le faire fonctionner individuellement, sans que la banque ne soit autorisée à vérifier l’origine ou la destination des fonds déposés et retirés.

En outre, la banque sera tenue au secret absolu sur le contenu et les opérations de ce compte à l’égard de tous, y compris du conjoint, sous peine de voir sa responsabilité professionnelle engagée pour violation du secret bancaire.

La liberté de prendre seul(e) des décisions concernant vos meubles

Il est possible de demander l’intervention du tribunal pour empêcher votre partenaire de s’engager dans certaines actions qu’il aurait pu faire de lui-même dans des circonstances normales, lorsque les intérêts de votre famille sont en jeu. Par exemple, si votre conjoint est un joueur compulsif qui dilapide les revenus et les économies du ménage.

Si votre conjoint est fautif, c’est-à-dire qu’il a gravement manqué à un devoir conjugal, et qu’il est urgent de protéger les intérêts de la famille, le juge ordonnera toutes les mesures nécessaires. Le juge possède donc un large éventail de pouvoirs, proportionnels à la gravité de la situation. Attention toutefois, ces dispositions ne peuvent être que temporaires, même si elles peuvent être renouvelées. En tout état de cause, elles n’excéderont pas une durée de trois ans.

La liberté de gérer seul(e) vos biens propres

Une fois encore, même si cela paraît aujourd’hui évident, ça n’a pas toujours été le cas, puisque la femme mariée s’est longtemps vu interdire cette libre disposition.

L’absence de vol entre époux

Afin de préserver la paix au sein des familles, le droit pénal a longtemps prévu une immunité absolue en cas de vol entre époux : autrement dit, il n’existait pas, pas plus que les délits associés d’escroquerie et d’abus de confiance. Cependant, dans certaines situations, cette règle peut s’avérer aussi absurde qu’injuste. Après tout, si vous vivez séparément depuis des années, cette immunité a-t-elle encore un sens ? Le nouveau Code pénal a nuancé la règle : vous ne pouvez pas invoquer l’immunité si vous êtes séparé de votre conjoint, ou si vous avez été autorisé par un juge à résider séparément. Cependant, sachez que pendant le concubinage, il reste impossible d’accuser votre partenaire d’un tel délit, et donc de le faire punir.

Le sort des dettes de votre ménage : la règle de la solidarité passive

Elle pose le principe général que ces dépenses engagent conjointement les époux vis-à-vis des tiers. En d’autres termes, la personne à qui vous devez de l’argent peut choisir d’exiger le paiement de la totalité de la dette à vous ou à votre conjoint, sans avoir à déterminer si vous étiez tous les deux d’accord pour utiliser l’argent du couple. Elle n’est même pas obligée de s’adresser d’abord à la personne qui a contracté la dette.

Cette règle ne s’applique qu’aux dépenses liées à l’entretien du ménage ou à l’éducation des enfants, comme la nourriture, le logement, les loisirs et l’éducation. Cependant, elle ne se limite pas aux dépenses essentielles. Par exemple, les frais de scolarité pour inscrire les enfants dans une école privée sont généralement soumis à cette règle, même si l’inscription dans un établissement public et donc gratuit était possible.

La loi écarte l’application de cette règle pour :

  • les dépenses manifestement excessives : par exemple, l’achat d’une voiture de luxe pour un couple de smicards, ou comme vu ci-dessus, l’inscription dans une école privée si votre couple n’en a pas les moyens;
  • les achats à crédit ou les emprunts dépassant les petites sommes nécessaires aux besoins de la vie courante : là encore, si vous avez emprunté à votre seul nom, et que les circonstances ne démontrent pas que votre conjoint(e) était d’accord, votre créancier ne pourra exiger le remboursement que de vous seul(e).

La conclusion de contrats entre époux

La loi a longtemps interdit les contrats entre époux, à quelques exceptions près : les mandats et donations, les prêts d’argent ou à usage, le partage au moment de la séparation… Aujourd’hui le principe est inverse : les contrats entre époux sont valables, à quelques exceptions près.

Trois types de conventions ont posé des difficultés, mais sont aujourd’hui admis :

  • Le contrat de travail entre époux, qui suppose un lien de subordination aux rapports conjugaux, et était donc soupçonné de créer un rapport malsain entre le salarié et l’employeur, outre les risques de fraude fiscale et/ou sociale qu’il pouvait dissimuler.
  • Le contrat de société entre époux, qui met au plan commercial les époux sur un pied d’égalité, et portait de fait atteinte à la suprématie de monsieur sur madame qui existait sur le plan conjugal: cette dernière ayant disparu, le contrat de société est logiquement devenu possible.
  • La vente entre époux, que l’on soupçonnait être une donation déguisée. Or, si les donations entre époux pouvaient être révoquées, cette « vente » ne le pouvait pas, et pouvait donc dissimuler une volonté de contourner la loi. Depuis la loi du 23 juin 2006 toutefois, cette révocabilité des donations n’existe plus, sauf pour les donations de biens à venir.

La contribution aux charges du mariage et le devoir de secours

Ces deux obligations sont distinguées par le Code civil, qui se garde cependant de les définir : pour faire bref, on parle de contribution aux charges pendant la durée normale du mariage, et de devoir de secours en période de crise.

Remplir votre obligation de contribution aux charges du mariage, c’est non seulement fournir une partie des éléments essentiels au quotidien de votre famille, mais plus largement permettre de financer toutes ses dépenses courantes : alimentation bien entendu, mais également loisirs, éducation des enfants, vacances, vêtements, argent de poche, etc.

Le montant de la contribution n’est pas fixé par le Code civil, et dépendra du train de vie de la famille, ainsi que des revenus de chacun :

  • Soit vous avez clairement prévu dans votre contrat de mariage la proportion de contribution qui devra être fournie par chacun d’entre vous. Votre souhait sera alors respecté, du moins si les moyens de l’un et de l’autre n’ont pas trop changé, et que la clause n’est pas manifestement déséquilibrée.
  • Soit vous n’avez rien fixé à l’avance, et dans ce cas le Code civil prévoit que vous et votre conjoint(e) pourvoirez aux besoins de la famille « à proportion de [vos] facultés respectives».

La contribution aux charges du mariage n’est pas toujours versée en monnaie sonnante et trébuchante, bien au contraire :

  • D’une part, si vous n’avez pas de revenus, vous pouvez la payer en nature, par exemple en vous occupant des enfants et de la maison, ou encore en collaborant à l’activité professionnelle de votre moitié (c’est l’exemple encore fréquent des membres de professions libérales dont le conjoint assure le secrétariat et/ou la comptabilité sans être salarié).
  • D’autre part, il est bien évident que vous n’allez pas tenir chaque mois une comptabilité de vos contributions respectives aux charges du mariage : elles se font naturellement, et c’est seulement en période de crise que le magistrat chargé du dossier fixera clairement leurs montants en euros.

Voilà donc pour les règles qui s’appliqueront avec ou sans contrat de mariage. Pour le reste, tout dépend de votre régime matrimonial. Or, il y a un nombre infini de régimes matrimoniaux, parce que vous pouvez créer le vôtre sur mesure. Je vais donc me contenter de citer deux grandes catégories de régime, après avoir étudié plus en détail celui qui s’applique à défaut de contrat : le régime légal.

Vous constatez que votre conjoint ne respecte pas ses règles, il est donc fortement recommandé de se faire assister par un avocat spécialisé en droit du divorce pour maximiser les chances d’obtenir gain de cause.

Le Cabinet Dyade avocats intervient, dans toute la France, pour défendre les droits des personnes en matière de divorce. N’hésitez pas à nous contacter pour toute information utile.

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